Le parler normand s’affiche à l’entrée d’une commune de Seine-Maritime

Bois-Héroult, en Seine-Maritime, a été dotée d’un panneau d’entrée d’agglomération écrit à la fois en français et en langue normande, ce vendredi 31 juillet. Cela doit permettre de promouvoir le patrimoine régional.

 
Samedi 1er août 2020 à 7:17 - Par Noémie Lair, France Bleu Normandie (Calvados - Orne). France Bleu Cotentin, France Bleu Normandie (Seine-Maritime - Eure). Bois-Héroult, France.

 

Bois Hroult B EROULa commune de Bois-Héroult est la première de Normandie à avoir son nom traduit en normand sur son panneau d'entrée. © Radio France - Noémie Lair

Les panneaux d'entrée d'agglomération en deux langues sont fréquents en Bretagne, au Pays Basque ou encore en Corse mais pas en Normandie. La région a inauguré vendredi 31 juillet son premier panneau écrit en français mais aussi en normand. C’est la petite commune de Bois- Héroult, à l'est de la Seine-Maritime, qui a été choisie. À l’entrée du bourg, il est donc désormais écrit : "Bois-Héroult" et "Bô-Érou".

Il s’agit là d’une volonté politique de la Région Normandie afin de redonner une place à la langue normande, parlée par à peine 30 000 personnes. Elle est d’ailleurs classée parmi les langues "sérieusement en danger" par l’UNESCO.

Quelques communes avaient déjà fait le choix d’ajouter un panneau en normand sous le panneau d’entrée de ville, notamment Brestot, dans l’Eure, à l’initiative de l'association de promotion de la culture normande, La Chouque.

Des mois de recherches pour aboutir à la bonne traduction

Pour mener à bien ce projet, la Région a créé le Comité scientifique et culturel des parlers normands il y a six mois. Il est composé d’une vingtaine d’historiens et de linguistes chargés notamment d’étudier l’origine des mots, la traduction en langue normande et de valoriser les parlers normands.

Le bois appartenant au dénommé Hérold.

Les chercheurs remontent des siècles en arrière pour retrouver les premières traces du nom des communes. "Nous recherchons les attestations et mentions anciennes dans les textes médiévaux, les chartes et les documents diplomatiques, explique Stéphane Laîné, linguiste à l'université de Caen. C'est ainsi que nous avons pu retrouver Bosco-Éroldi qui est la plus ancienne attestation pour Bois-Héroult, en 1203. Nous cherchons également dans les attestations écrites des formes qui rendent compte de la prononciation locale. Et là aussi, nous en avons retrouvé jusqu'à la fin du XVIIle siècle. "

Ils ont ainsi pu reconstituer le nom d'origine de la commune de Bois- Héroult, qui signifiait alors "le bois appartenant au dénommé Hérold".

Les chercheurs ont aussi pu s’appuyer sur les plus anciens habitants de la commune. "Un savoir qui risque malheureusement de partir en même temps qu’eux", regrette Édouard de Lamaze, maire de Bois-Héroult et conseiller régional.

Une façon de soutenir le patrimoine normand

Cette disparition de la langue normande au fil des années inquiète les élus de la Région. Tous les Normands ont en effet en tête voire utilisent tous les jours quelques mots comme "boujou" pour dire bonjour et au revoir, "la vaque" pour dire la vache et "à tantôt !" pour dire "à cet après- midi". Mais passées ces célèbres expressions, le vocabulaire est vite limité.

Édouard de Lamaze veut donc promouvoir le patrimoine normand au sens large. "Il faut se dépêcher de parler et reparler normand, de le réenseigner pour qu'il ne disparaisse pas. Certains nous disent qu'il faut plutôt apprendre le français et l’anglais et ils ont raison, mais ça n'empêche pas d’apprendre aussi le normand pour que notre tradition persiste. "

Nous nous comporterons comme le font si bien les Bretons en faisant la promotion de la Bretagne tous les jours.

Pour le président de Région, Hervé Morin, il est même question de "la fierté normande". "Derrière ce processus, explique-t-il, il y a l'idée qu'à chaque fois que nous porterons un peu plus notre identité et notre culture, nous participerons au rayonnement, à l'attractivité de notre région. "

Il fait ainsi la comparaison avec nos voisins : "en faisant cela, nous nous comporterons comme le font si bien les Bretons en faisant la promotion de la Bretagne tous les jours".

Une quarantaine de communes ont suivi l'initiative et ont demandé, à leur tour, la traduction de leur nom en normand.